L'Artiste

Je suis née "éveil"
Mes sens s'émerveillent
Au maniement du beau
Ceux qui maîtrisent les mots
en font des flèches au coeur
Ceux qui manient le pinceau
Repeignent la vie en couleur
Ceux qui avec des "do"
et autres notes conseurs
élève un "boléro"
et traduisent notre humeur

Quand on connaît son âme
On sait ce qui nous charme
Peut nous amener aux larmes
à déposer les armes

Quand on connaît son coeur
On en oublie sa peur
On efface sa pudeur
Pour celui qui demeure
Du beau, notre précepteur

Avec appréhension
Mais tout autant de passion
Je suis entrée dans l'atelier
Trop souvent encombré
d'oeuvres inachevées

J'ai découvert les corps
Les esquisses, les efforts
Pour rendre plus encore
brillants comme de l'or
Des modèles de nus
Au sommet parvenus

Bientôt, je serais couchée
Moi aussi sur ces toiles
Je viendrais rivaliser
Avec toutes ces étoiles

Soudain, je le sens là,
Silencieux comme un chat
Il observe mon émoi
S'en délecte à la fois

Le sensuel reste notre seule communication
Car l'Artiste n'est que passion
Tout comme elle, il est éphémère
Et c'est ce qui fait tout son mystère

Il me sait timide et fragile
Il restera subtil
Il effeuillera le corps gracile
Pour n'en garder que le pistil

Il caressera avec les poils
De son pinceau, la toile
Comme il me glissera
Dans la soie de ses draps

Il m'impregnera de sa matière
Me peindra pour que je sois à jamais sa passagère
D'un temps qui restera précaire
Mais qu'importe ?
Le liquide me noiera toute entière
Dans l'imagination de son égo
Il fera de ma peau
L'outil de sa création
Jusqu'à l'obsession

Je deviendrais son objet
Plus jamais je ne serais
La muse d'un autre
Il est mon apôtre

Mais l'artiste est infidèle
IL aime tirer les ficelles
Que je sois sa marionnette sensuelle
Repu de l'hydromel
IL courtisera une nouvelle Demoiselle
Un autre modèle

Car c'est le pouvoir de l'Artiste
Pour qu'il existe
Il lui faut créer, inventer
Il lui faut s'inspirer
d'infinies nouveautés